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RDC: les actionnaires d’Afriland First Bank CD réclament un audit contradictoire

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Ils dénoncent une mise sous administration provisoire planifiée et proposent cinq solutions pour remettre l’institution en selle, pour le bien des épargnants et la stabilité financière du pays.

Le feuilleton de l’heure dans le secteur financier en République démocratique du Congo suit son cours. L’événement primordial du 20 juin 2022, à savoir la mise sous administration provisoire de cette banque congolaise a été suivi trois jours plus tard, à savoir le 23 juin 2022, par l’envoi d’une correspondance des actionnaires à Marie France Malangu Kabeyi Mbuyi, gouverneur de la Banque centrale du Congo (BCC). Servie par voie d’avocats, la correspondance est signée par Jean-Paulin Fonkoua et Jean-Paul Kamdem respectivement président du Conseil d’administration d’Afriland First Bank Cameroun et vice-président d’Afriland First Group. Ces deux institutions pèsent à elles seules 95,6% dans le capital d’Afriland First Bank CD. Sur un ton véhément, les signataires dénoncent la décision de la Banque centrale qualifiée de planifiée, car devant servir un agenda caché plutôt censée remettre de l’orthodoxie.
L’exposé factuel et circonstancié des responsabilités de la BCC dans la dégradation de la situation d’Afriland First Bank CD permet alors de se rendre compte que les administrateurs et les actionnaires d’Afriland First Bank CD ont été écartés de tout contrôle de cette banque en juillet 2021 et que l’institution chargée de la régulation bancaire en RDC, la BCC, a en fait mis la banque sous administration provisoire de fait depuis août 2021, par le biais d’une mission de surveillance rapprochée. On apprend alors que c’est cette mission qui a géré Afriland First Bank CD entre août 2021 et juin 2022. Alors que cette banque disposait de fonds propres s’élevant à 48,05 millions de dollars au 30 juin 2021, la BCC a fait part d’un trou de 90 millions de dollars à combler à la date de mars 2022. Que s’est-il passé entre temps ? S trou il y a, qui en est responsable ?


Dans leur correspondance, les actionnaires renouvellent leur proposition de redressement, non sans dissiper toute équivoque. Ils s’inscrivent en faux contre les propos de la gouverneure de la BCC qui dans une communication, pointait « l’incapacité des Actionnaires et dirigeants de Afriland First Bank CD SA à engager des actions de redressements ». Ils relèvent, référence à l’appui, qu’ils ont transmis leur plan de redressement de la banque à la BCC. Ce plan est selon eux la seule option pour un retour à la normale au sein de la banque. Il porte sur 5 principaux points :
La délivrance des agréments aux Administrateurs, des exécutifs et des directeurs de la banque. La correspondance nous apprend que les dossiers ont été transmis à la BCC depuis plus de 2 mois. Selon les actionnaires majoritaires, cette mesure permettra à la banque de « prendre en charge la gestion, de mesurer l’ampleur des dégâts et proposer des mesures idoines ».
La remise par la BCC, conformément à la pratique internationale d’audit, de son rapport de contrôle ayant servi de support à son injonction du 17 mars 2022. « Cela nous permettra d’effectuer toutes les vérifications des faits et analyses de votre rapport et de fournir nos réponses techniques détaillées point par point. Avec celle-ci, vous pourrez alors tirer vos conclusions finales », détaille la correspondance.


La remise par la BCC de toutes les informations sur le « profil des risques inquiétants » identifiés dans son courrier du 17 mars 2022.
La décision conjointe (BCC et actionnaires majoritaires) d’un calendrier de remise à niveau de l’organisation de la banque. « En cas de désaccord sur les provisions ou conclusions, suggèrent les actionnaires majoritaires, nous proposons une concertation au sein d’une commission mixte composée des auditeurs de la Banque centrale, et des nôtres, pour examiner point par point chaque provision réclamée par la BCC et nos réponses et élaborer une position définitive »
Confrontation entre les auditeurs de la BCC et ceux des actionnaires majoritaires afin d’examiner point par point chaque provision réclamée par la BCC.


Pour les actionnaires, l’application stricte et exclusive de la loi bancaire est la principale voie de résolution de la crise que traverse actuellement Afriland First Bank CD. Malheureusement, ces propositions de redressement des actionnaires, pourtant pertinentes, restent pour l’heure ignorées par le Régulateur. Tout porte à croire, au regard des précisions factuelles et circonstanciées contenus dans la correspondance des actionnaires, que l’on assiste à un processus d’expropriation savamment orchestré. Comment comprendre ces nombreuses entorses de la BCC contre les initiatives et décisions des actionnaires majoritaires ? Pourquoi est-ce que des dirigeants déchus par un Conseil d’administration conformément aux statuts d’un établissement de crédit sont-ils adoubés par la BCC ? Comment comprendre l’éjection des actionnaires majoritaires de la gouvernance de la banque sans réel motif valable ? La réaction de la BCC à la correspondance de ces actionnaires majoritaires nous permettra certainement de confronter les deux versions afin de démêler l’écheveau de cette affaire pour le moins rocambolesque.

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