Le 6 janvier 2021 est déjà rentré dans l’histoire. Pour la première fois, le Capitole de Washington, siège de la démocratie américaine, a été pris d’assaut par des assaillants portant le drapeau américain pour empêcher la certification de Joe Biden à l’élection présidentielle du 3 novembre. Un fait qui sort complément de l’ordinaire surtout lorsqu’il s’agit des Etats-Unis. Alors, tendons-nous désormais vers une insurrection générale si l’on sait que l’Amérique est le modèle de démocratie dans le monde ?
Mercredi 6 janvier après-midi, à Washington, les supporteurs de Donald Trump, sans masque pour la plupart, ont continué plusieurs heures durant à se presser par centaines aux abords du Congrès, sur la colline du Capitole, pour dénoncer la certification de la victoire de Joe Biden à l’élection présidentielle du 3 novembre, qui devait avoir lieu le jour même. À l’intérieur du bâtiment, certains ont même interrompu la cérémonie. Nul ne pouvait dire alors s’il s’agissait d’une scène d’émeute – un comble pour des représentants du parti de « la loi et l’ordre » – ou d’un baroud d’honneur pour se faire entendre une dernière fois avant de quitter la scène.
Mais de telles images aux faux airs insurrectionnels, sur un lieu aussi emblématique de l’histoire des États-Unis d’Amérique, c’était du jamais-vu. Des images dénoncées le jour même par toutes les chancelleries de la planète, de Paris à Berlin, de Londres à Bruxelles, et même jusqu’au siège de l’Otan, où le chef de l’Alliance atlantique, Jens Stoltenberg, dénonçait des « scènes choquantes ». En début d’après-midi, une partie de ces supporteurs de Donald Trump se sont rapprochés du Capitole, dangereusement, utilisant des barrières de sécurité pour surmonter un muret. Certains, équipés de mégaphones, ont invité la foule à se rapprocher du bâtiment, où les forces de l’ordre ont utilisé du gaz lacrymogène pour les disperser.
Devant le Capitole, foule compacte de supporters trumpistes. Ils tentent de s’approcher du bâtiment où se déroule la certification des résultats de la présidentielle. Autour de 16 heures, heure locale, l’actuel président, après avoir soufflé le matin même sur les braises en appelant ses partisans quasiment à l’insurrection, tentait cette fois de refroidir leur ardeur en leur demandant de rentrer chez eux. Comme si de rien n’était, et en sauveur des institutions. Mais sans pour autant reconnaître la victoire de son adversaire du 3 novembre. Chaud et froid.
Au même moment, pourtant, survenait un pied de nez de la démocratie, ici chez elle, à ces foules venues tenter d’en contrarier le cours : une nouvelle en provenance de Géorgie faisant à tous l’effet d’une douche glacée. Dans cet État du Sud, où se jouaient la veille deux élections sénatoriales décisives, on apprenait, quelques heures après la victoire du révérend Raphael Warnock, un démocrate, celle plus surprenante de Jon Ossoff, autre démocrate, âgé de 33 ans, face au républicain David Perdue, avec une différence de 0,56 %.
Ce coup double démocrate dans un État républicain jusque-là réputé imprenable venait confirmer la prise de contrôle du Sénat par le parti de Joe Biden. Les démocrates disposeront en effet de 50 sièges au Sénat, comme les républicains. Mais la future vice-présidente Kamala Harris, comme le prévoit la Constitution, aura le pouvoir de départager les votes, et donc de faire pencher la balance du côté démocrate. Après la Maison-Blanche et la Chambre des représentants, le président élu était assuré de la sorte de disposer de tous les leviers du pouvoir à Washington pour au moins les deux premières années de son mandat. Au détriment de ces supporteurs trumpistes refusant toujours de reconnaître la défaite de leur favori, qui tournait ainsi à la déroute électorale